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Ne me contraignez, point, lui dit - elle, vous avouer une chose que je n'ai pas la force de vous avouer, quoique j'en aie eu

Ne me contraignez, point, lui dit-elle, vous avouer une chose que je n'ai pas la force de vous avouer, quoique j'en aie eu plusieurs fois le dessein. Songez seulement que la prudence ne veut pas qu'une femme de mon ge et matresse de sa conduite demeure expose au milieu de la 186 cour. - Que me faites-vous envisager, madame ! s'cria M. de Clves : je n'oserais vous le dire de peur de vous offenser. Mme de Clves ne rpondit point, et, son silence achevant de confirmer son mari dans ce qu'il avait pens : - Vous ne me dites rien, reprit-il, et c'est me dire que je ne me trompe pas. - Eh bien, monsieur, lui rpondit-elle en se jetant ses genoux, je vais vous faire un aveu que l'on n'a jamais fait son mari ; mais l'innocence de ma conduite et de mes intentions m'en donne la force. Il est vrai que j'ai des raisons de m'loigner de la cour et que je veux viter les prils o se trouvent quelquefois les personnes de mon ge. Je n'ai jamais donn nulle marque de faiblesse, et je ne craindrais pas d'en laisser paratre, si vous me laissiez la libert de me retirer de la cour ou si j'avais encore Mme de Chartres pour aider me conduire. Quelque dangereux que soit le parti que je prends, je le prends avec joie pour me conserver digne d'tre 187 vous. Je vous demande mille pardons si j'ai des sentiments qui vous dplaisent, du moins je ne vous dplairai jamais par mes actions. Songez que, pour faire ce que je fais, il faut avoir plus d'amiti et plus d'estime pour un mari que l'on n'en a jamais eu ; conduisez-moi, ayez piti de moi, et aimez-moi encore si vous pouvez. M. de Clves tait demeur, pendant tout ce discours, la tte appuye sur ses mains, hors de lui-mme, et il n'avait pas song faire relever sa femme. Quand elle eut cess de parler, qu'il jeta les yeux sur elle, qu'il la vit ses genoux, le visage couvert de larmes, et d'une beaut si admirable, il pensa mourir de douleur, et, l'embrassant en la relevant : - Ayez piti de moi vous-mme, madame, lui dit-il, j'en suis digne, et pardonnez si, dans les premiers moments d'une affliction aussi violente qu'est la mienne, je ne rponds pas comme je dois un procd comme le vtre. Vous me paraissez plus digne d'estime et d'admiration que tout ce qu'il n'y a jamais eu de femmes au monde ; mais aussi je me trouve le plus malheureux 188 hommes qui n'ait jamais t. Vous m'avez donn de la passion ds le premier moment que je vous ai vue ; vos rigueurs et votre possession n'ont pu l'teindre : elle dure encore : je n'ai jamais pu vous donner de l'amour, et je vois que vous craignez d'en avoir pour un autre. Et qui est, madame, cet homme heureux qui vous donne cette crainte ? Depuis quand vous plat-il ? Qu'a-t-il fait pour vous plaire? Quel chemin a-t-il trouv pour aller votre cur ? Je m'tais consol en quelque sorte de ne l'avoir pas touch, par la pense qu'il tait incapable de l'tre. Cependant un autre fait ce que je n'ai pu faire : j'ai tout ensemble la jalousie d'un mari et celle d'un amant ; mais il est impossible d'avoir celle d'un mari aprs un procd comme le vtre. Il est trop noble pour ne pas me donner une sret entire ; il me console mme comme votre amant. La confiance et la sincrit que vous avez pour moi sont d'un prix infini ; vous m'estimez assez pour croire que je n'abuserai pas de cet aveu. Vous avez raison, madame, je n'en abuserai pas, et je ne vous en aimerai pas moins. Vous me rendez malheureux par la plus grande marque de 189 fidlits que jamais une femme ait donne son mari ; mais, madame, achevez, et apprenez-moi qui est celui que vous voulez viter.- Je vous supplie de ne me le point demander, rpondit-elle ; je suis rsolue de ne vous le pas dire, et je crois que la prudence ne veut pas que je vous le nomme. - Ne craignez point, madame, reprit M. de Clves ; je connais trop le monde pour ignorer que la considration d'un mari n'empche pas que l'on ne sache amoureux de sa femme. On doit har ceux qui le sont, et non pas s'en plaindre ; et, encore une fois, madame, je vous conjure de m'apprendre ce que j'ai envie de savoir. - Vous m'en presseriez inutilement, rpliquait-elle ; j'ai de la force pour taire ce que je crois ne pas devoir dire. L'aveu que je vous ai fait n'a pas t par faiblesse, et il faut plus de courage pour avouer cette vrit que pour entreprendre de la cacher.
Analyse littrature :
Vous tudierez l'extrait dialogue dramatique >> partir de ne me contraignez point >> jusqu'
A faire : L'introduction, un paragraphe du dveloppement avec trois ides secondaires et la conclusion
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